Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
2 octobre 2008 4 02 /10 /octobre /2008 09:52
Les évolutions de la langue se font en catimini : un mot est là, on le profère toute notre vie, on le croit immortel puisque nous le portons, connu de tous nos semblables, de nos enfants, de nos amis... Puis un beau jour nous nous apercevons qu'il n'est plus là, le mot - disparu, usé, fini ! Sorti sans prévenir du langage de nos proches.
Le mois dernier, j'avais écrit innocemment dans l'un de mes manuscrits, à propos d'un sujet embrouillé que je pensais éclaircir : « Nous allons tâcher de voir pourquoi votre fille est muette. » À mon étonnement, mon éditrice, une jeune femme pleine d'idées et de culture, mais qui n'a pas quarante ans, a haussé un sourcil inquiet : « Je ne comprends pas ce que vous voulez dire. » La veille, mon amie Claire s'était, elle aussi, creusé la cervelle pour déchiffrer ce message abscons. Votre fille ? Quelle fille ? Pourquoi « muette » ?
Je dois avouer aux lecteurs des présentes feuilles qui partageront cette perplexité que j'aimais bien cette locution « Voilà pourquoi votre fille est muette » ; elle conclut par une pirouette, une fausse démonstration, un jargonnement obscur, un discours insondable. Il s'agit d'une réplique célèbre de Sganarelle dans Le Médecin malgré lui : contraint à coups de bâton de soigner une demoiselle qui fait semblant d'être muette par stratégie amoureuse, le faux docteur se lance dans une péroraison absurde truffée de trouvailles burlesques et de latin de cuisine, avant de conclure de la manière la plus abrupte :
« Et voilà pourquoi votre fille est muette ! »
Célèbre ?... J'ai dit « célèbre » ? - That is the question (fameuse réplique d'Hamlet en VO dans le monologue To be, or not to be). Justement, parmi ces fines allusions littéraires dont notre culture était pétrie, combien le sont restées, célèbres ? Lorsque nous disons de quelqu'un « Pourquoi s'est-il fourré dans cette galère ? », je ne sais pas combien de gens, aujourd'hui, ont en tête la scène originelle des Fourberies de Scapin : « Qu'allait-il faire dans cette galère ? ». J'ai le sentiment depuis un mois, depuis la déconvenue que j'ai dite, que je parle d'un temps, pour parodier Aznavour, que « les moins d'quarante ans » ne peuvent pas connaître. « Point d'argent point de suisse », c'est-à-dire sans argent vous n'aurez jamais rien - vibre pour qui, à présent ? Quels sont ceux qui ont cloué sous le crâne le mot de Petit Jean dans Les Plaideurs ? De Racine ?
Difficile de savoir ce que nos voisins ont dans la cafetière - en matière de langage j'entends - les personnes que nous aimons. C'est un sujet dont on ne parle guère, finalement... Les moins de quarante ans sont nés à l'époque de la Fronde - celle de Mai 68 bien sûr, dont les effets à retardement ont été aussi gigantesques que ceux de 1648. Que leur reste-t-il, à eux qui sont tous allés au collège, de nos amours classiques ? Des atteintes imprévues aussi bien que mortelles ? Faisons discrètement une enquête, il est à parier que nous aurons des surprises importantes.
Je connus l'an passé une jeune femme de vingt-sept ans, née sous Giscard d'Estaing, qui prépare une thèse de doctorat de lettres. Cette chargée de cours à l'Université me jure ses grands dieux n'avoir jamais rencontré l'expression « tomber de Charybde en Scylla » - jamais entendu, ou lu nulle part, ni au lycée, ni en classe de prépa, ni à la fac... Alors c'est la roue qui tourne, bonnes gens, imperceptiblement. Elle nous pousse doucement, nous qui avons perdu, bien avant, la plupart des finesses de la culture latine qui avait nourri ceux de nos grands-parents qui en avaient été gavés. Un clou chasse l'autre, vieux dicton. J'entends raconter qu'on n'enseigne plus du tout le grec ancien, en France, nulle part...
On me dira que les adolescents, aujourd'hui, font beaucoup, beaucoup de choses, et tout avec une intensité farouche. Cela est vrai. On les doit, de surcroît, instruire du monde et de ses nouveaux débats. Ils n'ont plus le temps d'étudier les classiques... Et puis, ma foi, on a ouvert l'école sur la vie. Dieu merci, on a mis de grandes fenêtres partout pour mieux voir passer les monstres. Des grandes et des petites fenêtres... Avec toutes ces ouvertures, il se glisse de méchants courants d'air, forcément. Et c'est ainsi que votre fille... vous savez le reste.

Claude Duneton
in Le Figaro

LE PLAISIR DES MOTS 
15/10/2007
.
Partager cet article
Repost0
17 juin 2008 2 17 /06 /juin /2008 10:45

Le journaliste de foot ne dit pas :

a perdu MAIS s’est incliné

a gagné MAIS s’est imposé

marquer MAIS concrétiser ou inscrire un but


Le journaliste de foot dit souvent :

Consécration, grand’ messe, état de grâce, je crois que … même s’il ne va pas à la messe. Et aussi revoir sa copie.


Le footballeur interviewé dit toujours : je crois que… c’est vrai que…
Et aussi c’était pas ma faute si j’ai perdu, mais autrement.
 

 

Partager cet article
Repost0
2 juin 2008 1 02 /06 /juin /2008 23:31


pour ceux qui ne connaissent pas encore,
téléchargez la BD "Le Pédago Fou"
par les auteurs de "Les Profs".

http://mousepotato.over-blog.com/article-13775155.html



(Fichier Powerpoint de près de 7 Mo - ADSL recommandé)

Partager cet article
Repost0
27 mai 2008 2 27 /05 /mai /2008 14:07


... on dit qu'il est :

archaïque
arrieré
autoritaire
classique
coco
coincé
colonialiste ou -pire ? - néo-colonialiste
conservateur (un mot qui commence mal, aurait dit Bernanos)
controversé
crispé
dépassé
dogmatique
extrémiste
d'extrême-droite ou -pire?- proche de l'extrême-droite
fâchiste
fanatique
fondamentaliste
hitléro-trotskiste (ça date)
homophobe
inquisiteur
intolérant
intégriste
moyenageux
nationaliste
nazi
négatif
nostalgique
orienté
partisan du retour à l'ordre moral
pas ouvert
paternaliste
pétainiste
populiste
raciste
réactionnaire
rétrograde
ringard
sectaire
strict
tradi(tionnaliste)
ultra-libéral

qu'il est figé (ou crispé) dans ses certitudes
qu'il veut revenir en arrière,
qu'il veut nous ramener au Moyen Age
qu'il a des dérapages
qu'il a une attitude d'exclusion
qu'il a des réflexes identitaires
qu'il tient un discours sécuritaire
qu'il fait du prosélytisme
qu'il est attaché aux conventions
qu'il veut imposer ses idées
qu'il retourne à ses vieux démons
qu'il nous rappelle les heures les plus sombres de notre histoire
qu'il surfe sur l'insécurité
qu'il est pour la discrimination
qu'il véhicule des thèses nauséabondes

Bref ...
qu'il est méchant.


Partager cet article
Repost0
21 avril 2008 1 21 /04 /avril /2008 14:14

La guerre des mots, de Jean-Yves CLOUZET

Edtions de Paris , Prix : 20 € , mars 2008 , 92 pages

spacer

La mainmise subversive sur le vocabulaire malmène la faculté de comprendre et de raisonner. Ces mots nous jettent en proies à la désinformation et à la guerre idéologique.

Constat de la dégradation délibérée du langage et analyse des procédés d’agression, l’ouvrage démasque les instigateurs et leur desseins.

Il détaille les méthodes de corruption des mots et de la langue : amalgame, anglicisme, autocensure, désarticulation, diabolisation, falsification, fracture, glissement, optimisation sécuritaire, jargon... néologisme, silence...

Au texte, enrichi d’exemples, de références, de notes et d’une bibliographie, sont joints des index qui multiplient les directions de recherche sur la « guerre des mots ».

Jean-Yves-Marie Clouzet, titulaire d’une maîtrise en droit, journaliste émérite et conférencier, a publié plusieurs études sur le communisme et la vie des médias. Il est sociétaire des Écrivains combattants.

Dans la presse

Monde et Vie, n° 793, 5 avril 2008
Dans la guerre des idées, les mots sont des armes, d’où la guerre des mots sous titré « du vocabulaire à la subversion ». La novlangue a de beaux jours devant elle, tant la dégradation du langage est délibérée. L’ouvrage analyse les méthodes de corruption des mots et de la langue, un bon outil pour le XXIe siècle pour tous ceux qui ne veulent pas s’en laisser conter.

Partager cet article
Repost0
7 avril 2008 1 07 /04 /avril /2008 11:15
La désinformation par les mots (1/2)
avec Maurice Pergnier, professeur émérite à l’université Paris XII

Popularisé en France par feu Vladimir Volkoff, le mot « désinformation », né en Russie, respire le parfum suranné de la Guerre froide, lorsque les maîtres de l’espionnage soviétique jouaient aux échecs avec le monde dit "libre". Mais en dépit des efforts tous azimuts déployés par Moscou, l’avenir montra que les sociétés ouvertes triomphent toujours des sociétés fermées. Cette émission est la première d’une série de deux.

Emission proposée par : Annet Sauty de Chalon
Adresse de cet article : http://www.canalacademie.com/La-desinformation-par-les-mots.html
Référence : PAG244

 Ecouter cette émission en ligne (durée : 00:30:39) :


 Télécharger cette émission (21.1 Mo)
Sur le lien ci-dessus, faire un clic droit et "Enregistrer la cible sous..."


La supériorité de la démocratie ne réside pas seulement dans un pouvoir politique légitime mais dans la multiplicité et la vitalité des forces qui la composent et qui, s’opposant les unes aux autres, donnent vie à un système complexe où tout est possible.

A l’inverse, la faiblesse de la dictature tient au caractère unique du pouvoir qui, pour se maintenir, est constamment obligé de réprimer des individus dont elle ne peut même pas chercher le consentement. La propagande sévit dans les sociétés fermées et brutales. Aux sociétés ouvertes et complexes, « on » applique la désinformation. Volkoff la définissait ainsi : « Manipulation de l’opinion publique à des fins politiques par des moyens détournés de traitement d’une information véridique ou non ». L’intoxication des masses n’a pas disparu avec l’écroulement de l’empire rouge.

Bien au contraire. La source a changé mais la guerre des mots se répand d’autant plus vite que les media comme Internet rendent l’espace public accessible à tous et font tomber les barrières entre les hommes. Les mots font alors l’objet d’une surchauffe sémantique car tous les rapports de forces reposent sur le sens qu’on leur donne. La politique est bien la définition symbolique de la réalité.

Maurice Pergnier se livre à une réflexion aussi cruelle que pertinente sur l’usage admis de certains vocables, « une fois ces derniers passés à la moulinette du politiquement correct ». Qu’il s’agisse des « banlieues », des guerres du golfe ou du conflit dans les Balkans, la Désinformation par les mots (aux Editions du Rocher) dresse un inventaire parfois truculent des ambiguïtés, des euphémismes – en réalité des mensonges – qui opacifient le discours pour mieux caricaturer la réalité.


Maurice PERGNIER est linguiste, sémiologue et écrivain. Il est professeur émérite de linguistique générale à l’université Paris XII. Il a publié « La résurrection de Jésus de Nazareth » et « La désinformation par les mots » aux éditions du Rocher.

Pour écouter la seconde partie de cette émission, cliquez ici : La désinformation par les mots (2/2)

Partager cet article
Repost0
7 avril 2008 1 07 /04 /avril /2008 11:12

La désinformation par les mots : Les mots de la guerre, la guerre des mots
de
Maurice Pergnier (Auteur)

La désinformation par les mots : Les mots de la guerre, la guerre des mots

La Désinformation par les mots est un réquisitoire aussi cruel que pertinent sur l'usage admis de certains vocables, une fois ces derniers passés à la moulinette du politiquement correct. Aussi Maurice Pergnier s'en prend-il particulièrement à tous les thèmes qui " font
problème ", et sur lesquels une position même légèrement dissidente effarouche les tenants de la " pensée unique " : les jeunes, les banlieues, la démocratie, l'islamisme, l'Europe, ou encore le multiethnisme. Présenté sous la forme d'un dictionnaire alphabétique, La Désinformation par les mots bénéficie en outre d'une entrée en matière qui est un véritable morceau d'anthologie. Livre drôle, percutant et qui s'éloigne résolument des sentiers battus, l'ouvrage est vivement recommandé à tous ceux qui ont su conserver une authentique liberté d'esprit.
Partager cet article
Repost0
27 mars 2008 4 27 /03 /mars /2008 20:57
 De façon générale, on peut dire qu'en Chine les gens disposent maintenant de deux niveaux de langage: l'un naturel et humain, qui leur permet d'utiliser leur propre voix, et qu' ils adoptent pour bavarder de leur santé, du temps qu'il fait, de la nourriture, du dernier match de basket-baIl, etc., et l'autre strident et machinal, pour traiter de toute question politique. (...) Le jargon de l'idéologie est en prolifération constante: le régime croit pouvoir se sauver de la banqueroute idéologique en se réfugiant dans l'inflation verbale. (...) J'ai déjà signalé plus haut quelques-unes de ces distinctions logomachiques qui amènent le langage courant à perdre son sens: ainsi celle qui est faite entre les " stimulants matériels" (maudits) et les " justes rétributions proportionnées au labeur fourni" (encouragées); on pourrait y ajouter " la révolution permanente" (hérésie trotskiste) et la " révolution continuelle" (développement génial et créateur apporté par Mao Tse-tung à la pensée marxiste). 

Simon LEYS, "Ombres chinoises", 1974

Partager cet article
Repost0
25 février 2008 1 25 /02 /février /2008 22:57

gros-mots.jpg

Les feuilles con !

Autre phénomène : le gros mot qui se banalise tellement qu’il en perd son sens premier. Merde, putain et con forment ainsi le tiercé gagnant du gros mot d’autrefois qui se transforme en "banale interjection devant toute phrase exprimant un désagrément." 

Certains de ces mots peuvent même se vider presque totalement de leur "signifié précis" :

"Mon cul", par exemple, ne fait ainsi que souligner la reprise par Zazie  du terme que vient d’employer son interlocuteur." Ce qui nous donne :

"Tu es bien gentille de t’occuper de mes affaires...
- Gentille mon cul, rétorqua Zazie."

Employé de façon aussi systématique, le "mon cul" en question en perd évidemment toute valeur provocatrice...

Même chose avec l’emploi qui est fait du mot "con" en pays toulousain où personne ne semble s’offusquer d’échanges tels que "Putaing con, qu’il est con ce gonze con !"...
L’auteur rapporte même la célèbre blague-devinette que ce tic de langage à provoqué : Qu’est-ce qui tombe en automne, qui commence par f et se termine par n ?... Réponse : les feuillescon !

lu sur  http://www.mhb7.info/marginal-au-pays-du-langage.htm
Partager cet article
Repost0
17 décembre 2007 1 17 /12 /décembre /2007 23:14

 

 La langue politiquement correcte

Voici un sujet qui fâche Georges Lebouc, qui vient de publier "Parlez-vous le politiquement correct?" aux éditions Racine. L'entretien dans lequel il présente cet ouvrage est particulièrement intéressant et sans concession pour ce que devient la langue usuelle des Français, ou plutôt celle qu'ils entendent et qui conditionne donc leur pensée. Non pas la "langue des banlieues" (ou encore des SMS...) qui reflète en partie l'échec d'une éducation qui se veut nationale, mais bien celles des nantis qui consiste à ne pas dire, à offrir un "prêt-à-penser" qui anesthésie chez chacun réflexion, discernement et jugement. A ne pas annoncer des vérités brutes, la langue du politiquement correct peut aller jusqu'à tuer l'intelligence et annihiler la volonté et l'action.
Extrait de l'entretien :

"Comme le but est de ne pas appeler les choses, on recourt à des formulations négatives, comme «non»-apprenant (un cancre) ou «mal»-sachant, ou «contre»-performance (en fait, un échec), «sans»-abri (clodo), «dys»-fonctionnement (qui vaut tellement mieux qu'une bavure policière, par exemple)"(...)
"Comme s'il était préférable de dire aliénation que folie, oncologie ou carcinologie que cancérologie. Il y a également l'utilisation de mots étrangers: on n'est plus un homosexuel montré du doigt quand on est gay. Sans oublier e recours aux acronymes, HLM, IVG, HP... De bien beaux euphémismes!".

Et si la langue est le reflet de la pensée et de son courage, celui des personnes "autorisées à penser" ne fait plus de doute.

Lahire

PS : Quelques perles ici ... à compléter dans les commentaires?

Posted on décembre 11, 2007 at 11:55 AM | Permalink

http://lesalonbeige.blogs.com/my_weblog/2007/12/la-langue-polit.html

Partager cet article
Repost0